Une cloche parmi les vaches
Pourquoi la Suisse me dirais-tu si tu pouvais me dire quoi que ce soit que je puisse entendre de l’autre côté du clavier, alors qu’au fond, il existe tant de destinations autrement plus exotiques. Comme dirait feu le docteur Helmut Perchu (je me suis remise tout récemment à écouter les émissions complètes du « monde de monsieur Fred », géniale émission bien qu’un tantinet vulgaire proposée par Frédéric Martin et Daniel Morin sur Ouï fm aux environs de 2006/2007) (merde, j’en étais où déjà, ah oui c’est bon, j’ai retrouvé :) « J’ai explication ! ».
Fièrement armée de mon expérience de journaliste de terrain (et oui, les sols labourés des festivals comptent comme du terrain presque autant que Bagdad), j’ai été engagée par la Société X* (*et puis quoi encore, vous n’alliez tout de même pas croire que j’allais me dévoiler comme ça dès le premier coup d’œil, fripons va !) pour mener une enquête de satisfaction quant à leurs produits. Je répugne un peu à trop rentrer dans les détails de ce côté-là, déjà parce qu’ils sembleront obscurs pour quiconque ne s’intéressant pas plus que ça aux ressorts de l’agriculture contemporaine, mais aussi et surtout parce qu’ici n’est pas vraiment le but de ce blog. Pour faire simple et comme ça c’est torché une bonne fois pour toute, X propose une gamme de produit visant à équilibrer les sols et/ou la santé du bétail sans ajout de produits chimiques.
Une autre petite précision me semble intéressante à fournir. Cela fait deux mois seulement que je suis en possession du précieux petit papier rose m’autorisant à coller (non sans une fierté de poux, cela va sans dire) un beau « A » au postérieur de mon destrier. Si cette compétence nouvelle est sans aucun doute belle et bonne, elle ne me soulage pas pour autant d’un bon paquet d’angoisse sur les petites routes de montagne. Et pour le coup, en Suisse, je ne suis pas en reste.
C’est bon, mon sac pèse trente tonnes et ma tête à peu près pareil (il fallait bien que le titre de ce blog ait une signification). Vous avez à peu près toutes les données en main. C’EST PARTI.
Lundi 3 août 2009 :
La Clio et moi-même sommes heureuses nous entendons plutôt bien, je remercie le ciel et surtout mon père de m’avoir offert ce merveilleux GPS et les dames enfermées dans les cages sur l’autoroute tirent la gueule, bref, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. J’arrive quand même à me perdre aux environs de Montbéliard, mais bon, j’ai un sens de l’orientation très personnel et j’avais envie d’entendre la voix de la dame du GPS s’exciter toute seule en m’ordonnant de TOURNER À GAUCHE DÈS QUE POSSIBLE (par ailleurs, ne pourrait-on pas suggérer aux constructeurs de GPS d’ajouter quelques insultes pour rendre leurs indications plus crédibles ? Ca ferait un co-pilote nettement plus authentique avec quelques « bordel de scheiss », non ?).
Bon, je me perds encore en sortant des tunnels pour atteindre une ferme toute paumée au milieu des montagnes (ahhhh ben oui et ce n’est que le début). Accueil courtois de l’agriculteur. Je vous offre en prime quelques photos de cette saloperie de rumex qui bouffe les pâturages et contraindrait presque les exploitants à prendre un abonnement chez Pfeizer tellement leur éradication est stressante.
L’agriculteur vit vraiment reclus au milieu de ses montagnes et je commence à me demander comment serait ma vie si j’avais grandis dans une maison où il n’y a pas de réseau wi-fi à moins de 50km à la ronde. Comprends-moi bien, lecteur, j’ai passé le douloureux cap du quart de siècle et j’en suis à plus de 20 déménagements. Et ce qui m’a toujours aidé à m’intégrer à chaque nouvel endroit, c’est le confort de pouvoir ouvrir la fenêtre sur le monde à n’importe quel moment alors que celle de ma chambre donnait sur un mur de béton. J’imagine que le son des cloches des vaches a quelque chose de très apaisant et que si on a jamais vu « Shining », les nuits semblent moins longues. J’aurai tout le loisir de réfléchir à tout ça à l’hôtel.
Direction Delémont centre-ville, l’auberge de la tour rouge.
Bon, c’est pas loin de l’autoroute, au moins c’est pratique à défaut d’être joli et ma chambre est plutôt grande. Crevant la dalle, je m’enfonce dans les tréfonds de la vieille ville afin de me taper des nuggets de poulet gros comme un poing pendant que mon amoureux tente de m’expliquer que j’ai tout intérêt à couper la 3G sur mon portable si je veux éviter de payer une note de téléphone équivalente au PIB du Togo. Il est gentil, et il comprend toutes ces choses techniques tellement mieux que moi ! Ce n’est que quelques heures plus tard, quand j’ai reçu un message d’Orange CH et que j’ai réalisé que 0,09 € pour 10 Ko allait effectivement me coûter un bras, que je me suis dit qu’il fallait vraiment que je commence à l’écouter quand il me parle de trucs chi… heu, utiles.
Malheureusement pour moi, malgré les explications de l’aubergiste, je n’ai pas accès à internet depuis ma chambre et j’ai oublié d’acheter un adaptateur avant de partir. Me voilà donc contrainte de regarder Johnny Depp faire le mariole avec un mec déguisé en pieuvre qui à l’air de lui en vouloir à mort. Comme je n’ai pas particulièrement l’habitude de m’endormir tôt et que je suis d’un naturel légèrement angoissé, je réalise un acte d’un bravoure extrême : j’éteins la télé pour m’endormir dans un endroit inconnu.
Non ?!
Si.
Et j’aurai mieux fait d’arrêter de me la péter.
Vers 4h du matin, je commence à rêver qu’une vieille femme vêtue de guenille et perdue au milieu d’une cave remplie de branchage est l’incarnation du diable ou que du moins elle est possédée par un truc franchement pas cool. Pour une raison que j’ignore encore, mon amoureux me prends la main en lui disant un truc du genre « tu vas voir vieille folle, ma copine est super forte et va t’exorciser », moi j’essaie vainement de me rappeler de quelques prière et la vieille se met à rire. Là, je me réveille en sursaut, et croyez moi : la télé de cette put… de chambre s’est allumée juste à ce moment là !
Et non, je n’avais pas oublié d’éteindre le décodeur non plus
Et encore moins non, je n’ai pas glissé sur les télécommandes, je les avais posées sur la table de nuit.
Alors si vous vous posez la question, oui, j’ai eu les boules.
Et oui, j’ai mis un bon bout de temps avant de me rendormir. Sauf que le lendemain matin, j’ai rendez-vous à 8h avec mon deuxième agriculteur.
Mardi 4 août
Et à 8h, je dors encore. Jusqu’à 8h45, pour être exacte.
Heureusement, le type m’a oublié autant que mes oreilles, le son de mon réveil, mais quand même, j’en mène pas large et j’ai la désagréable sensation que quelque chose me colle à la peau : ah oui, c’est mon sommeil. Un achat de sandwich et adaptateur plus tard, je me rends vaillamment (oui, enfin, autant que faire se peut) vers le reste de mes interviews. J’arrive à en caler quelques autres pour les jours à venir entre midi et deux et j’arrive même à me motiver pour aller nager un petit kilomètre, histoire d’être sûre que malgré l’angoisse que ma chambre soit possédée par le fantôme d’une vieille dame habitant dans les caves, je sombre comme une masse.
Pour le fun et votre culture personnelle, voyez plutôt l’ingéniosité des suisses en matière d’aménagement en plein air : des petits pots qu’on plante au bord de sa serviette pour servir de cendar portatif.
Ils sont malins ces alpins !
Swimming pool’s walls are always the same
Et voici la plus chère auge du monde !
Ouai, sinon ça fait une assez belle baignoire...
Au passage, vu que c’est quand même un blog de voyage, j’ai quand même croisé quelque paysage de carte postale. C’est limite si j’ai pas eu envie d’en faire une miniature et de l’enfermer dans une boule à neige…
Après avoir goûté à la tête de moine chez un gentil agriculteur, le dernier de ma journée (la vache, mais ça déboite ce fromage !) c’est légèrement tremblante à l’idée que quelque chose sorte de sous mon lit que je décide de m’y jeter (au lit). Et là, j’attends tellement, tellement de voir s’il va m’arriver quelque chose, à tel point que je n’écoute même plus les divagations de JD dans la saison 7 de Scrubs, que je ne sombre que tard dans les bras de Morphée (par ailleurs, mon amoureux commence à me manquer pendant que j’y suis)…
… Du coup, j’ai l’air aussi fraiche qu’une figue en novembre au réveil.
Rhaaaa !
Et pour le coup, c’est ce matin que je vois mon agriculteur loupé la veille. Je me shoote à grandes lampées de café, paie l’aubergiste en souhaitant ne plus jamais avoir à dormir chez lui. Rattroupe mon cartel de fringues et mes deux ordinateurs dans le coffre de la Clio qui se trouve un peu égratignée par les ronces rencontrées la veille (oui, c’est effectivement une connerie de tenter de prendre une photo sans avoir braqué le frein à main, ni même enlevé la 1ere dans un chemin qui descend). Et c’est reparti. Deux rendez-vous dans la mâtinée, j’enchaîne avec la longue traversée de petites routes de montagne bien flippantes, surtout quand une BMW se coince derrière vous et que toutes les autres voitures semblent rouler en 5em (mais enfin, comment elles font pour pas se planter ?). Je déjeune dans un hôtel/restaurant de bord de route rempli de vttiste en caleçon moulant (j’aurai adoré vous en offrir quelques uns en photo, mais 1) : c’était un peu délicat sans se faire capter, 2) ; des photos de Michel Drucker dans n’importe quel VSD feront tout aussi bien l’affaire, croyez-moi). L’endroit est sympa, mais une fois de plus, je me demande comment font les gens pour survivre à cette sensation d’isolement. Et pourtant, je n’ai rien vu ! L’endroit où vit le 3em agriculteur donnerait des sueurs froides à Stephen King. Plus isolé, tu meurs. Pourtant, son fils de 18 ans semble s’en accommoder très bien et j’ai comme l’impression qu’il me nargue avec sa toute belle aisance sur tracteur. Quand je pars au toilettes (j’adore aller aux toilettes chez les gens, je trouve ça fantastique et extrêmement enrichissant, pour preuve : j’ai découvert qu’on pouvait même faire des « caches rouleaux de pq » en crochet !) et que je me trompe de porte (promis, pour le coup, je n’ai pas fait exprès) j’entends les sœurs du gamin dire : « attention machin elle va t’attendre dans ta chambre ! ». Huuum, c’est sympa…
Allez, merci pour le verre d’eau, faut que je me taille !
Direction Bienne, sous un soleil de plomb !
Bienne, tel que je le découvre, est une ville incroyablement chiante à conduire. Il y a des travaux partout, le GPS s’emballe en me disant de sortir à gauche quand, tout ce que je vois, c’est une rue en face et les automobilistes ont l’air de penser que parce qu’ils ont la priorité à droite, il n’y pas besoin de suivre les feux ! Non mais c’est quoi cette ville de merde !?! Au bout de trois tours de rond-point pour trouver la sortie qui me mène à ma chambre d’hôte, je finis par planter mon paquetage devant la porte d’une maison ; close.
Certes, le petit post-it « Frau Viva » aurait du m’éclairer sur la manière de pénétrer dans la maison sans avoir à embrasser la carrière d’Arsène Lupin. Sauf que, voyez-vous, il était en allemand, et grâce à M. Rufflin, mon prof de collège qui passait plus de temps à s’amuser avec la bretelle de nos soutiens-gorge qu’à nous faire découvrir la beauté de la langue de Goethe, tout ce que je sais dire c’est « ich habe mein badekappe vergessen ». Vous ferez un effort, vous chercherez par vous même, vous verrez, c’est super utile. Me voilà donc à essayer de me souvenir que la logeuse m’avait vaguement parlé d’un truc à regarder « sous » la boite aux lettres. M’enfin, madame, sous la boite aux lettres, il y a de l’herbe et pis c’est tout. Je finis par la rappeler, donc la déranger, tout ça pour comprendre que sous « le compartiment » boite aux lettres, il y effectivement une petit espace pour planquer des trucs, comme des clés par exemple.
Oh joie bonheur ! Je vais pouvoir prendre une douche et me débarrasser de ces vilaines heures de tension que j’impute à la ville.
17h : hop ! Retour sur la route, rencontre avec une vieille dame à l’âge honorable de 75 ans qui utilise X pour s’occuper des ses abeilles. La dame est charmante et parle un français parfait bien qu’il ne fasse aucun doute qu’elle vienne plutôt de la Suisse allemande. Cette dame a une histoire assez particulière. En 1967, alors qu’elle est mère de plusieurs enfants, et n’a jamais travaillé la terre de sa vie, son mari meurt et lui laisse la totalité de l’exploitation. Elle remonte ses manches, ne se décourage pas et décide que l’exploitation sera biologique. Et ça marche ! Actuellement, elle vit dans une très jolie maison à côté du lac de Bienne et s’occupe de ses abeilles le reste du temps, et puisque que vous avez été sages de lire jusqu’ici, quelques photos de son paradis.
Alors certes, la dame est gentille, courageuse et attentionnée mais j’aurai préféré qu’elle ne se mette pas à me poser des questions du type « qui êtes vous », « qui est Dieu pour vous », « est-ce que vous savez qu’il existe un grand nombre d’état négatifs qui vous rapprochent, vous et votre corps de la mort ? ». Et quand elle m’a sorti son grand tableau de classification des émotions selon Ron Hubard, j’ai eu un petit mouvement de déception. J’ai écouté, posé deux trois questions, notamment sur la raison pour laquelle les bébés doivent naître dans le silence (apparemment, au moment de la naissance, le bébé est dans une sorte de coma hypnotique et son inconscient retient tous les mots et sons autours de lui pendant sa gestation et sa mise au monde).
J’ai passé une bonne soirée et vu des choses très belles et douces, mais ne peut m’empêcher d’être déçue à l’idée que les gens qui sont vraiment contents du produit pour lequel j’enquête sont parfois un peu… spéciaux. De toutes manières, il est l’heure de rentrer, je prends congé du soleil et de la dame.
Jeudi 6 août :
Mon prochain rendez-vous est dans la région de Fribourg en début d’après midi, ce qui me laisse tout le temps d’appeler une bonne liste de personnes pour caler les interviews de la semaine à venir. J’ai la joie de découvrir qu’à Château d’Oex les gens n’ont rien à envier aux portes de Fleury-Mérogis en matière d’amabilité. - C’est gentil à vous de me passer vos vaches pour bien me faire comprendre que vous n’avez pas de temps à m’accorder mais bon, je ne viens pas vous vendre des portes-fenêtres non plus ! -
Tant pis, je reprends la route, me délecte en écoutant Couleur 3 tout en enviant l’ingéniosité de leurs animateurs en matière de squetches et de pub (oui, dans une vie antérieure, j’étais animatrice radio) et me vois tout de même contrainte de me taper du Macdo à midi. 2 entrevues et demie plus tard (j’ai quand même rencontré le responsable commercial de X en Suisse histoire d’avoir l’air un tantinet professionnelle), Clio en main je me dirige vers Freiburg !
En toute honnêteté, lorsque j’ai reçu mon GPS en guise de cadeau de bienvenue sur les routes, à aucun moment, je n’ai imaginé qu’il ne saurait m’indiquer une rue dans une ville de taille moyenne. Un lieu dit dans une bourgade reculée ou un chemin de terre paumé dans une coin de campagne, ok, mais avoir été incapable de me donner la rue des forgerons à Fribourg, j’avoue que ça me laisse coite. Sous un soleil de plomb, moi et mon allergie à la chaleur (si, c’est vrai, je palpite deviens aussi sympathique que Taz en pleine crise d’hypoglycémie et tombe facilement dans les pommes, je suis un régal à vivre en vacances, et encore, vous ne m’avez jamais connu quand j’ai faim) nous garons à côté de l’office du tourisme histoire de repérer le chemin de ma chambre d’hôte. Heureusement, la femme de l’office est assez claire et patiente pour m’expliquer en détail comment m’y rendre et c’est tout haletante que je rappelle ma logeuse pour savoir si peux débarquer dès maintenant. Coup de bol pour moi, ça l’arrange.
C’est alors que je reprends le volant du bout des doigts et de la fesse puisqu’entre temps l’équipe d’MTV est venue me faire une blague et à pimpé ma caisse en sauna. Et croyez-moi, se taper des virages en épingles à cheveux sur des pentes de 15° sans pouvoir toucher le volant, c’est du sport ! Evidemment, j’ai choisi une chambre où il est impossible de se garer et je me trimballe mes 35 kg de fringues inutiles (note pour plus tard : se rappeler qu’en deux semaines, on met généralement toujours le même t-shirt, la même jupe et que seuls comptent les sous-vêtements), mes deux ordis (ceci est une autre histoire) et ma fatigue jusqu’à l’appartement. Et là, j’ai enfin pu poser mes bagages et mon stress. Et en plus, c’est beau :
J’ai même fait quelque chose qu’aucun de mes profs de sport, membre de ma famille, petits amis accumulés au cours des 20 dernières années n’aurait cru possible : j’ai enfilé un short et des baskets et je suis allée courir ! J’avoue que même pour moi, à écrire, ça constitue un choc. Il faut savoir qu’à part pour danser en soirée (ce que je fais avec BEAUCOUP plus d’énergie que de talent, mais en tous cas, on me remarque) ou aller nager, ma pratique du sport se limite aux ébats amoureux et la recherche d’une paire de chaussure à ma taille et à mon goût pendant les soldes. Certes, les aficionados de ces pratiques en reconnaitront la valeur en terme de dépense énergétique, mais n’importe qui d’autre me rira au nez. Et aura sans doute raison. Pourtant là, en ce beau jeudi soir, les rayons de soleil étant un peu moins brulants mais juste assez pour me rappeler de m’enduire d’écran total, je suis partie fièrement, « le monde de monsieur Fred » dans les oreilles, faire quelques petites foulées.
J’avoue, j’aurais aimé pouvoir vous dire que j’ai couru une heure sans m’arrêter et que le bitume glissa sous mes pieds comme la truite dans les mains du pêcheur amateur, mais soyons francs, si vous avez suivi la description de mon histoire sportive, vous comprendrez facilement que ce fut loin d’être le cas. Si je devais commenter mon expérience, je dirai qu’au bout d’un quart d’heure, ma tête à commencer à vouloir imploser, j’ai senti mon visage passer du blanc crème (oui, en ce moment, je suis bronzée) au rouge « porcinet en colère », et ma vue se brouiller. C’est lorsque, au bout de 17 minutes, la route a commencé à grimper sérieusement que mon mental de Rocky Balboa a faiblit. Je me suis dit « allez, tant que ça monte comme ça, je marche rapidement et je m’y remet ensuite ». Mais si vous êtes comme moi, vous savez très bien qu’ensuite, vous avez un point de côté qui vous rappelle à l’ordre dès que vous essayez de sautiller et que votre souffle a décidé de jouer à cache-cache avec vos bronches. Au final, j’ai couru 20 minutes en tout sur presque une heure de sortie et je me suis consolée en me disant que c’est l’effort qui compte, pas le résultat.
Et puis, ce qui est cool, c’est que ça m’a déculpabilisé de prendre deux (petits) steaks à la-je-ne-sais-plus-comment et des frites au restaurant des trois rois le soir même. Au passage, pas très sympa, la patronne des trois rois…
Vendredi 7 août :
Allez, en route pour la campagne, je n’ai pas tant de gens à voir que ça et si je me démerde bien, je peux même finir assez tôt.
Et c’est ce que je fais.
Bon, je précise que j’ai du attendre quelque chose comme une heure et demie dans un village ou le commerce principal est la boulangerie (fermée entre midi et deux) et que les quelques personnes rencontrées pendant ma promenade m’ont presque agressée par leur « Bonjour » (note pour plus tard : toujours dire « Bonjour » en premier dans un village suisse, TOUJOURS). J’ai un peu l’impression d’être perdue dans un épisode de « Twin Peaks », le brouillard en moins. D’ailleurs, au passage, je remarque des produits vraiment particuliers dans ce village.
Le dernier agriculteur rencontré expédie mes questions à une vitesse jusque là jamais rencontrée et c’est plutôt contente de moi que je réalise que cette première semaine de boulot s’achève.
Pour fêter ça, je décide de me rendre à la piscine de la Motta, à un petit quart d’heure de marche de mon appartement. Et, tout en marchant, j’ai l’impression de me changer en une autre personne.
Comprenez moi bien, ces derniers temps, tant de choses ont changé dans ma vie, et à une vitesse si grande que j’ai parfois l’impression de me regarder vivre et de me demander qui est cette fille avec des yeux un peu plus fatigués dans la glace. Je suis loin d’être malheureuse de tout ça, mais, entre mon permis de conduire, mon amoureux qui ne me jette pas dans les affres du doute et du désespoir et qui semble rire de ma collection de névroses et mon sport trois fois par semaine, je me demande où est passée la fille qui mettait des perles dans ses cheveux, rêvait de porter des Doc Martens (oui, mais le cuir était trop dur et me faisait saigner les pieds) et fumait autant de pétards que de clopes à l’eucalyptus.
J’en suis donc là de mes considérations quand j’arrive devant la piscine et que je réalise que je n’ai plus un franc suisse sur moi et que j’ai complètement oublié de chercher un distributeur en chemin. J’explique mon cas à la dame de l’accueil qui, sans doute à moitié par pitié, à moitié par flemme, me laisse passer en me demandant de revenir demain pour payer ma place. Pour un demi franc, elle garde mon portefeuille, mes clé et mon téléphone et je m’enferme dans les chiottes enfiler ce machin à grosses fleurs avec des bouts de ficelle partout que j’appelle mon maillot de bain. C’est au bout de quelques brasses que je réalise que la quarantenaire suisse nage d’une manière bien singulière. Sanglée de poids, elle marche littéralement dans l’eau (oui, sur l’eau j’aurai eu des problèmes avec ma religion). Après enquête, il semblerait que ce soit le dernier truc à la mode pour soigner des articulations défaillantes.
Pour finir, je m’offre un super bon restaurant italien, Bindella, avec un gaspacho à tomber par terre et une nouvelle de Raymond Queneau dans les oreilles !
No work for me today !
Le seul agriculteur que j’aurai du interviewer par téléphone m’a oublié et me force à le rappeler la semaine prochaine. Wouhou !
De plus, mon amoureux doit venir me retrouver dans l’après-midi !
Je vous offre donc quelques images du café/restaurant le plus sympa visité jusqu’alors : le café du musée de la marionnette. Des supers prix, une ambiance piano bar et une cuisine toute fraiche du marché, inventive et pas prétentieuse pour deux sous ! Amateurs de tartes au citron meringuées et de Louis Amstrong, come happy and hungry !
Le reste de mon week-end est suffisamment romantique et nian nian pour que je vous en évite le détail. Si vous deviez savoir une chose néanmoins, Fribourg est une très bonne ville pour les amoureux. Et la fondue aux herbes du café du midi est à tester impérativement !
Dimanche 9 août :
Lever tardif, steak de cheval et bavette, en route pour quelques musées. En fait, comme on s’y est pris comme des grosses buses, on a juste pu faire l’espace Jean Tingueli et Niki de St Phalle dont vous pouvez admirer quelques unes des œuvres shootées pour votre plaisir !
Au passage, j’ai quand même racheté ma conscience en allant payer ma place de piscine de vendredi et j’ai eu un petit frisson dans le dos d’honnêteté. Que le premier qui me trouve ridicule essaie un jour d’être vraiment honnête, vous verrez, c’est un peu comme décider de boire de l’eau dans une fête parce qu’on est censé ramener tout le monde, au début c’est relou, mais la sensation de bien faire devient tellement grisante que ça devient presque plus agréable que le risque d’avoir une grosse barre au dessus des yeux le lendemain. Comprenne qui voudra. Ce doit être mon côté catho…
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Bisous