The origin of symmetry (ou pourquoi vivre une vie à soi quand il en existe une de 42' ?)

Avouez que c'est dingue, non ?
J'étais là, tranquille, peinarde, dans mon lit, à vaguement tenter de rester immobile afin de conserver la présence de mon hôte. Non, ma vie sentimentale ne s'est pas subitement mis à être assez intéressante pour vous être narrée (et puis d'abord, est-ce que je vous connais assez pour vous confier ce que seuls ma mère, ma meilleure amie, mes amis mâles et une bonne partie de mon répertoire endurent de manière quotidienne ?), c'est juste que mes pieds servent d'oreiller à un félin qui prend de plus en plus des allures de Garfield, tant dans la narcolepsie que dans l'obsession pour la nourriture et l'absolue misanthropie.

Je suis donc là, dans cette espèce de bateau de bois surplombant ma chambre à me demander combien d'heures j'ai passé devant des séries afin de combattre l'insomnie, du moins l'accompagner.
Ce qui nous ramène à : combien de séries ai-je pu suivre en me donnant la fallacieux excuse de travailler mon anglais, sous prétexte que je suis trop impatiente pour attendre que les épisodes sortent sous-titrés ? Ce qui nous ramène à combien de théories ai-je pu écouler afin de justifier ma préférence pour un épisode de Gossip Girl face à tous ces films que je me suis jurée de voir ("la dernière tentation du Christ", "les toilettes du pape", "le monde selon Monsanto", ce dernier n'ayant rien à voir avec une quelconque religion si ce n'est celle des pesticides) ?
Ce qui nous a ramène à : pourquoi aime-je autant les séries ?

Et à vrai dire, je ne suis même pas sûre d'être capable d'apporter un semblant de réponse à cette question. Question qui par ailleurs semble tellement à la mode depuis quelques années qu'il m'apparaît déjà extrêmement galvaudé de la poser, mais bon, il est tard et ce n'est pas le félin croquettomane qui me tiendra éveillée.



Quitte à plonger dans l'océan des lieux communs, les séries sont un peu l'auberge espagnole du bouffeur d'images, on y trouve ce qu'on y apporte.

J'ai pour ma part glissé un orteil frisquet dans le bain des séries télés depuis les années 80. Nourrie à coup de Madame est servie, de Parker Lewis ne perd jamais et de 21 Jump Street, je ne me suis jamais douté que j'investirai autant d'énergie à savoir si Cudy allait enfin laisser tomber sa garde et son string pour Greg House.
Et pourtant, j'ai succombé. Et le problème avec les séries, c'est que lorsqu'il y en a plus, y'en a encore !

Voici donc où j'ai caché mes neurones pendant un mois et demi.
Tout d'abord parce qu'on m'en avais vaguement parlé et surtout parce qu'après mon accident je suis allée voir Twilight 2 et que j'ai eu envie de rester sur la lignée des vampires pré-pubères, j'ai découvert "the vampire diairies".



Le fond de la série est quasi-inexistant : une vague histoire d'amour à travers les siècles et une rivalité entre deux frangins, tous deux aussi différents que vampires. Pas de quoi fouetter une gousse d'aïl. Mais je suis quand même allée jusqu'au bout de la saison 1, histoire d'être sûre que je n'étais pas faite du même bois que la téléspectatrice chercheuse d'émotion cheap à vivre par procuration.
Résultat : raté.

Du coup, après je me suis lancée dans la saison 3 de Gossip Girl, qui correspond à peu de choses près à ma tartine de rillettes au cornichon télévisuelle, à savoir : a guilty pleasure.
Je l'admet, mon intérêt pour cette série est plus axé autour de l'audace vestimentaire des personnages que de leur aléas personnels. Franchement, à côté de Gossip Girl, les personnages de Dawson étaient des modèles de constance. Et si je trouve cette troisième saison beaucoup trop axée autour du personnage de Blair, j'avoue avoir pouffé devant les efforts désespérés des scénaristes pour être à pointe de la branchitude. A savoir : offrir à Daniel, l'intello-sans-lunettes-mais-névroses, un plan à trois avec la godiche guest star de la saison Hilary Duff et Jessica Szohr (Vanessa). Ce qui m'a semblé amusant n'est pas tant le fait qu'un garçon au demeurant dépeint comme empoté côté séduction arrive à se taper 2 bombasses un soir de téquila, mais plutôt la certitude que les scénaristes pensaient très certainement atteindre le paroxysme de la décadence et de la coolitude. Le plan à trois étant, avec l'expérience homosexuelle, un rite de passage obligatoire pour tout adolescent qui se respecte. Acte oh combien libérateur parce que subversif !
Je ricane.


 Toi mon chaton, tu vas te sentir aussi coupable qu'un verre d'eau au réveil 

Pour poursuivre, j'ai voulu tester mon amour pour Joss Whedon et savoir si son talent de producteur ne l'avait pas abandonné depuis Buffy contre les vampires. Moquez vous tant que vous voudrez, mais Buffy est LA série qui aura su faire évoluer son personnage principal tout au long des saisons.
Tout en se battant contre les forces du mal, qui ont bien sûr élues domicile au dessus de son lycée, l'héroïne traverse toutes les douleurs de l'adolescence bien chiante (pléonasme) dans les règles. Et au fond, quelle jeune fille de 15 ans n'aime pas se comparer à une nana qui bute du vampire à tire larigot et qui se prend des taules en maths ? Sauf que voilà, si Buffy traversait le fleuve des prises de risque, des amours impossibles et le constat que grandir, c'est loin d'être aussi fun qu'une pyjama/murder party, son ancienne copine Eliza Dushku se ridiculise un peu plus tous les épisodes dans sa nouvelle série ; Dollhouse.


C'est ça, dors, tu oublieras tes parts de marché

Le principe : dans un présent à peine modifié, une société secrète commercialise des "poupées", des êtres humains ayant consentis (plus ou moins volontairement) à prêter leur corps afin qu'un organisme y implante une personnalité choisie en fonction des besoins du client. La poupée en bleu sur la photo a compris entre deux lavages de cerveaux que c'était pas super moral comme affaire et compte bien mettre un terme à toute l'histoire, venger le monde et pourquoi pas aller manger des frites après. L'actrice étant co-productrice de la série, la moindre des choses est bien de se donner le bon rôle. Mais si au moins elle était un peu moins jolie ! Malgré les apparences trompeuses de cette déclaration, je ne suis pas jalouse de l'actrice (ou alors de ses seins, mais là n'est pas le problème), c'est juste que tout son jeu est basé sur son joli minois. Elle ne se mouille jamais totalement. Mais ceci étant le cas pour tellement d'actrice actuellement, le point vaut-il seulement d'être relevé ?
Au final, Dollhouse est une série qui se veut plutôt noire et avant-gardiste mais qui n'arriverait pas à faire grimper le taux d'adrénaline d'un cochon d'Inde.

Ce qui, par chance, fut le cas de Fringe.
Je me suis lancée sur les conseils d'un ami : "tu vas voir, c'est un peu comme X-file, en un poil plus funky". Et la définition est tellement juste qu'elle se suffit à elle-même. Du coup, vivre avec Olivia Dunham et l'imminence du choc de deux univers m'a presque fait oublier que c'était bientôt Noël et que Dieu sait que cette période me rappelle de mauvais souvenirs.
J'avais 6 ans, nous attendions mon père avant que le père Noël n'arrive et on l'a retrouvé mort coincé dans la cheminée deux semaines plus tard en allumant un feu.
Ah non, merde, ça c'est dans Gremlins.
Quoiqu'il en soit, Fringe commence assez doucement, mais on s'habitue vite aux lubies de bouffe de Walter, à la blondeur un peu lisse et intouchable d'Olivia et au sourire narquois de Peter (oui, ça on s'y habitue très vite). Mais surtout, chaque épisode donne lieu à une mise en abîme des peurs touchants l'inconscient collectif. Que ce soit le monstre sous-terrain, l'auto-combustion ou le ver intestinal dévoreur d'entrailles, Fringe arrive à captiver le spectateur en lui offrant la possibilité de croire à la réalité potentielle de la situation. Le genre de série qui te donne envie d'aller au lit en t'assurant qu'il n'y a rien en dessous et de profiter de ce délicieux sentiment de trouille mêlée d'excitation. Une série qui me donnerait presque envie d'être née sous d'autres cieux avec un poil un peu moins important dans la main afin de tenter le concours d'entrée au FBI.



Bon, c'est pas tout ça, mais il reste encore quelques minutes avant que le soleil ne se lève.

Juste assez pour dire que Glee est une série amusante et plutôt légère, malgré ses airs de comédie underground. L'histoire à peine vue (revue ?) de quelques inadaptés qui décident de former le club chorale du lycée. Ça danse et ça chante en playback à tous les étages et le genre aurait pu être novateur s'il n'avait pas déjà été surexploité depuis "the breakfast club", (donc depuis 1985, ça nous rajeunis pas). Accordons quand même un tantinet de crédit à Glee ; c'était un parti pris audacieux de faire danser une équipe de football américain sur "Single ladies" de Beyonce.


En même temps, Justin l'a déjà fait avant, et en collant s'il vous plait !

Ados toujours, la série Skins, qui a tant fait parler d'elle l'année dernière, révélant aux quelques parents qui avaient encore des doutes sur le sujet que oui, un ado, ça baise et ça boit, se révèle un chouilla décevante. Peut-être est-ce du au fait que lorsque j'ai regardé la première saison, j'étais en train de bosser pour les Transmusicales de Rennes et que des jeunes bourrés et plein d'acide, j'en avais devant moi toute la soirée, j'ai été un peu... déçue. Certes, Skins montre une jeunesse qui se défonce, et beaucoup, mais le fil conducteur, c'est que lorsqu'on est jeune, point n'est besoin de morale, ni de capote, ni de mesure. Et au fond, Skins m'a fait l'effet d'un vieux cupcake de trois jours ; appétissant dans la vitrine, mais dur à digérer.



Et, à l'heure où je vous écris, je viens de terminer la saison 3 de Californication.
Et si mon père n'est pas mort dans la cheminée, je n'en ai pas moins un bon vieil Electre à régler. Alors, en cette période censée être familiale, voir ça :



... ça me remue un tantinet. Voyez-vous, en ce moment j'ai mal à mon papa. C'est rien, c'est cyclique.

Au fond, je suis persuadée que tout ce que nous regardons nous influence autant que notre propre vie influe sur les scénarios.
Je vais essayer d'être plus claire, dans "l'histoire-caméra" (ed. Gallimard), Antoine de Baecque raconte comment l'image, la représentation d'une réalité a pu influencer notre propre réél. Bon, lui il le fait très bien sur 489 pages, moi je vais juste essayer d'en retirer la substantifique moelle : si les scénaristes se basent sur la nature même de leur cible (ex : les ados de skins sont très certainement ceux qui ont regardés la série), notre manière d'appréhender cette proposition de réalité peut nous inciter à changer telle ou telle chose dans notre vie. Je ne dis pas que, dans le cas de Skins, des ados fétards sont devenus plus ou moins junkies en observant leurs semblables se rouler dans des orgies d'ectasy. Je ne sais pas si la série à légitimé un comportement en le donnant à voir ou si elle n'a fait qu'en rendre compte.
Je dis qu'émotionellement, l'impact que peut avoir le fait de se glisser dans la vie de personnages pendant 10, 12 ou 24 fois 42' ou 27' n'est pas sans conséquence sur notre propre manière de réfléchir à notre vie une fois l'écran éteint.
Un peu comme lorsqu'on quitte un bouquin qui nous aura tenu en haleine pendant 400 pages. La dernière page tournée, on est plus tout à fait dans le livre, mais pas encore dans notre vie à nous. Il y a bien un ressort qui ne peut être que de l'ordre du ressentis personnel pour voguer dans cet entre-deux. Peut-être est-ce pour ça que les séries ont un tel succès ? Peut-être est-ce que c'est pour ça que j'ai tant chialé à la mort de Nate Fisher. Que j'ai réalisé que c'était une énorme connerie de coucher avec son ex en regardant Ted et Robin s'en donner à coeur joie. Que je suis restée bouche bée les dernières minutes de la saison 4 de Dexter. Que je ne regarde plus Big Bang Theory parce que Sheldon me fait penser à un lointain cousin à qui je foutrai bien des claques.

La série n'est pas qu'un passe-temps, puisque rien ne peut aider le temps à passer plus vite, c'est une échappatoire*.
Mais au final, n'est-on pas justement, complètement nous-même au moment précis où l'on cherche à s'échapper ? Qu'est-ce que c'est que cette maladie ? L'immaginite aigue ?

Tout ce que je sais, c'est que ce n'est pas un lupus.



* Merci à ma chanteuse pour la formule

PS : Ne croyez pas que j'en ai fini avec le sujet, parce que ce n'est pas en susurrant toutes les semaines "xxx, la chaine des séries" que je vais arrêter d'en regarder !

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