Des séries et des femmes

Je le sens.
Comme un goût salé qui brûle ma glotte tout comme votre curiosité a rongé vos rétines pendant des mois.
Ai-je donc fini par mettre quelqu'un dans mes draps ou ai-je de nouvelles séries à faire découvrir à vos heures de glandages ? En cet instant décisif, j'ai la joie de vous annoncer que non, ma pââssion pour les séries ne s'est pas éteinte et ce malgré les tentatives de mon entourage pour me rendre un semblant de vie sociale (mention spéciale à mon caviste).

Ce qui avait commencé comme un gentil hobby me rappelant l'époque où je n'avais cure de donner un vernis à mes propos à coup de Giraudoux et de Yoshi Oïda, est devenu une véritable drogue. Ainsi qu'une autre forme de vernis, quand on y pense.
Oui, chaque semaine je dois savoir ce qu'il advient de l'amour déchirant de Meredith Grey pour son cardiologue grisonnant qui le vaut bien, de la gestion des ovaires d'Adisson Montgomery, de la consommation de cachetons de Greg House (qui le vaut bien aussi), de la note de carburant de la chevrolet Impala des frères Winchester... Quand arrive l'été, je me ronge les sangs pour savoir si Sookie Stakhouse deviendra un jour un peu moins niaise, et chaque fois je réalise que c'est peine perdue. Ses neurones ont été asphyxés par son 90D.

(si ce paragraphe t'est incompréhensible, ceci pourra sans doute t'aider)

Mais là où c'est devenu plus inquiétant, c'est qu'il m'est devenu impossible de me contenter de ces déjà nombreuses tranches de vies télévisées. Il m'en a fallu plus, toujours plus.

C'est ainsi que l'hiver dernier, je me suis enfilée les 3 saisons de "How Not to live your life"



Ainsi va la vie de cet adolescent attardé de Don (Dan Clark, tuons le suspens tout de suite, je pense qu'on a dépassé le principe d'identification de deux coudées). Ayant hérité de la maison de sa grand-mère, il gère tant bien que mal un accompagnateur de personnes âgées envahissant et masochiste, une voisine acariâtre et une colloc dont il rêve jour comme nuit. Le scénario n'a rien de transcendant, ni sur le papier, ni dans l'absolu. Mais les quelques pastilles où Don/Dan rêve éveillé dans le quotidien sont savoureuses.
Note : 5/10 : Ne vous emmerdez pas, regardez les meilleurs passages sur youtube.

Pour rester chez nos amis anglais, et parce que la bouille de Chris O'Dowd commençait à sèrieusement  me manquer depuis l'arrêt de "the IT Crowd" ( toi même tu sais), 

je me suis lancée dans la mini-série de la BBC "The crimson petal and the white". L'adaptation du roman de Michel Faber est brillante. mais ça, concrètement, même si vous avez lu le bouquin, vous vous en foutez. Non, ce qui est bon dans cette mini-série, outre son format déculpabilisateur, c'est la prestation d' O'Dowd dans un registre tragique, l'évolution sociale d'une pute cultivée dans l'Angleterre Victorienne et Gillian Anderson en maquerelle fripée.
Pour tout ça et pour la prestation de Romola Garai en prostituée pleine de puissance et de délicatesse contenue (on lui pardonnerait presque "Dirty Dancing 2" pour la peine), "The Crimson Petal and the White" vaut bien ses quelques heures de détente, un verre de sherry à la main.
Note : 7/10, il faut supporter le rythme languissant et les gaines..

Du coup, à force de parler de putes et de XIXème siècle, difficile de passer à côté de "Maison Close".
Je sais pas trop ce qui s'est passé cette année, entre la série produite par Canal+ et le film de Bertrand Bonnello (http://www.lemonde.fr/cinema/article/2011/09/20/l-apollonide-souvenirs-de-la-maison-close-envoutantes-fleurs-du-mal-de-bertrand-bonello_1574834_3476.html) mais le corset a plus que jamais la côte. S'il est certain que le long-métrage met l'accent (avec un peu de lourdeur et de redondance parfois) sur la nécessité d'un débat sur la condition actuelle des prostituées, mise en abîme par celle du siècle dernier, la série met en avant la vie intime, les aspirations de ces femmes.
Mais j'entends par femme l'essence de la Femme. Pas de fausse pudeur dans les rapports, mention spéciale pour la mise en vente de la virginité d'une nouvelle arrivante (on est loin de la grâce du mizuage. Quoique tout bien considéré, j'ignore la part de délicatesse d'une telle coutume). Bref, tout ça pour dire que "Maison Close" remplit son office et réveille l’œil lubrique comme l'amateur de parfums poudrés. Et en ce qui concerne l'essence de la Femme, c'est son désir de liberté que la série met en avant. Les héroïnes courent toutes après la même chose, comme un rêve, comme quelque chose d'inatteignable, avec la réelle conscience qu'à l'extérieur elles ne feront que quitter une prison pour une autre.. Souvent féroce, avec quelques longueurs, on loue dans cette série le jeu des comédiennes et le talent du directeur de la photo.
Note : 7/10, too much sex sometimes kills the sex


Ce qui est amusant, parce que c'est exactement l'inverse de ce qu'on pourrait dire de "Xanadu". J'y étais pourtant allée de bonne foi. Une série autour du porno produite par Arte... Peut-être un mélange entre "Tracks" et une bonne vielle soirée théma capote ? Mais en fait non. Ou alors sous un fourgon d'Atarax.
"Xanadu" est une célèbre maison de production de films porno dont la gloire s'est éteinte avec la disparition de leur égérie, mère de famille de toute une tribu aussi malsaine que décomposée. La série tourne autour de cette icône de l'alcôve mais plus précisément autour du mal être de tous les maillons de cette industrie qui se dit saine et équilibrée. En ça, le propos de "Xanadu" semble justement centré. A force de vouloir dresser le portrait de personnages qui avalent des doubles p. au petit déjeuner sans ciller, la série, par effet cathartique, ne fait qu'exposer au grand jour les plus grosses failles de celles qui ne sont souvent que des fentes. Mention spéciale pour Vanessa Demouy en Mickael Vendetta du porn sous anti-dep.
Note : 4/10, ça a beau être estampillé canal, il faut supporter le filtre "ciel plus bas que le moral d'un condamné" sur toute l'image. Sans parler du sujet... (deviendrais-je prude ?)

Et pour donner un semblant de cohérence à cette note (je vous rassure, on n'a même pas parcouru un tiers de ma collec'), impossible de passer sous silence l'extraordinaire "Mildred Pierce". Avant d'avoir été une mini-série (très) primée aux derniers Emmy Awards, l'héroïne du roman éponyme de James M. Caine avait déjà relancée la carrière de Joan Crawford en 1945. Kate Winslet n'a certainement pas eu besoin d'une bouée de sauvetage pour sa carrière, ce qui ne l'a pas empêchée de camper une Mildred époustouflante de justesse.


Années 30, Miss Pierce fout son mari adultère et chômeur à la porte, faisant fi du regard des voisins. Elle veille assidument à la bonne éducation de ses filles (cours de chant, de piano, de cricket et j'en passe) et commence malgré tout à travailler dans un dinner pour faire face aux jours de vache maigre.
"Mildred Pierce", c'est parallèlement l'histoire d'une femme qui, partie de rien et mariée à peine pubère, prend les rênes de sa vie en main et devient une puissante business woman, mais aussi une mère à l'amour aveugle. Car "Mildred Pierce", c'est tout autant l'histoire du personnage éponyme que celle de sa fille.
Véda (aveuglante Evan Rachel Wood), est une forme d'antéchrist roux, une succube à l'effrayante noirceur d'âme, la personnification de cette capacité à tirer profit de tout, de tous. Si Mildred, sans manquer un instant de lucidité sur sa situation de femme de pouvoir, sait donner, Veda (ne) sait (que) prendre.
Et c'est tout autant la dualité mère/maîtresse femme que celle de la mère et de la fille que cette série met en avant.
Une œuvre qui ne laisse rien devant elle.

Note : 9,5/10 - Etre une œuvre signifie aussi manquer parfois de légèreté

A l'issue de ces longues heures passées avec toutes ces femmes, je suis devenue adhérente à "Osez le féminisme" et achète "Causette" tous les mois.
N'allez pas me dire que les séries n'apportent rien au quotidien.

http://www.osezlefeminisme.fr/
http://www.causette.fr/

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